« Ainsi dit l'Éternel : que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse,
que le fort ne se glorifie pas de sa force,
et que le riche ne se glorifie pas de sa richesse.
Mais qu'il se glorifie, celui qui me comprend et qui me reconnaît,
de ce que je suis l'Éterne, qui agit avec amour, justice et droit sur la Terre,
car c'est en cela que je prends plaisir, dit l'Éterne. »

                                                                                                                                                        (Jér 9 : 23-24)

 

 
 



Le trait d'union


    L'importance d'une juste idée de Dieu apparaît clairement quand on considère que l'idée de Dieu fait l'intime de la pensée chez tous ceux qui ont de la religion, et comme Dieu est universellement dans toutes les choses de la religion, il en résulte que s'il n'y a pas une juste idée de Dieu, il ne peut y avoir de communication avec le Ciel. Les choses théologiques résident au-dessus de toutes les autres dans l'esprit humain et l'idée que l'on a de Dieu en forme l'intime, si donc cette idée est fausse, il s'ensuit que toutes celles qui en découlent sont fausses et falsifiées. En effet, l'intime constitue l'essence même des choses qui suivent et qui sont formées à son image, de même que l'âme forme le corps à son image.

(DA 13 ; ES 40)

    L'idée d'un Dieu invisible n'est déterminée sur aucun dieu, ni terminée en aucun, c'est pourquoi elle cesse et périt. L'idée de Dieu comme esprit, quand on croit que l'esprit est comme l'éther ou le vent, est une idée vaine. Une idée d'un Divin d'après l'univers visible sans fin, ou avec une fin qui se termine dans l'obscur, se confond avec celle des adorateurs de la nature, aussi tombe-t-elle dans la nature, et devient nulle.

(AR 224 ; AC 8705)

   Sans une juste idée de la relation entre le monde spirituel et le monde naturel, l'homme tombe facilement dans le naturalisme qui nie l'existence de Dieu.

(DP 75)

    Sans l'idée de l'espace et du temps, l'homme ne peut pas même penser quelque chose. L'homme, dans le monde naturel, forme les idées de sa pensée, et par suite son entendement d'après l'espace et le temps. 

(AC 3938 ; DA 69)

    Si donc vous vous formez de Dieu l'idée qu'il est le soleil de l'univers, certainement d'après cette idée vous verrez et vous reconnaîtrez sa Toute-Présence, sa Toute-Science et sa Toute-Puissance. D'après la chaleur et la lumière du soleil, on peut se former une idée du bien de l'amour et du vrai de la sagesse.

(VRC 837 ; DC 114)

  On ne peut penser à Dieu qu'en se le représentant d'une façon humaine, car ce qui est incompréhensible ne peut tomber dans aucune idée, ni par conséquent dans aucune foi. 

(AC 9359, 9972)

    L'idée de Dieu entre dans tout ce qui est de la religion, et par cette idée se fait la conjonction, et par la conjonction se fait la salvation. Sur la juste idée de Dieu est fondé le Ciel entier, et sur Terre l'Église entière, et en général toute religion.

 (AR 839)

    L'idée de la pensée sur Dieu est la principale de toutes, car par elle se fait la conjonction avec le Divin, et par suite avec le Ciel. L'idée de Dieu comme invisible, ainsi sans forme et sans qualité, ne tombe dans aucune idée de la pensée. Les patriarches et les prophètes, d'après ce qui est rapporté dans la Parole, ont vu Dieu sous une forme humaine, et l'ont reconnu pour le créateur de l'univers, mais aujourd'hui cette perception intérieure a péri, elle est restée seulement chez les simples qui sont dans la foi. On ne peut penser au sujet de Dieu, qu'en se le représentant dans une forme humaine, car ce qui est incompréhensible ne tombe dans aucune idée, et sans idée il n'y a aucune perception de quoi que ce soit.

(TU 158 ; DC 305 256)

 
 

   La foi en l'existence d'un Dieu ou pas, la représentation que nous nous faisons de lui, fonde et détermine, pour Swedenborg, tout notre système de croyance. Système de croyance qui conditionne en dernier ressort les valeurs qui nous animent, ce que nous pensons, disons et faisons. C'est dire son importance, mais Swedenborg va encore plus loin. Il montre que l'idée, l'image, que nous avons de Lui conditionne aussi les modalités de notre relation avec Lui. De là on comprend mieux la raison pour laquelle cette idée différencie et diversifie à l'infini les hommes, les religions et les mondes supérieurs.

    Swedenborg ajoute au mot "idée" un adjectif qui change toute la donne : "juste". Il y aurait donc des représentations du Divin erroné voire stériles, et à l'opposé une "juste image" de Dieu. Le Divin n'est pas seulement invisible et impersonnel, il est aussi une personne, parce que l'archétype même de la Personne, il est humain parce qu'il est l'Humain même, car comme Swedenborg le rappelle régulièrement, selon le texte de la Genèse, l'homme a été créé "à son image et à sa ressemblance", et les voyants et les prophètes des temps bibliques, qui ont eu le privilège d'en avoir la vision, le décrivent comme ayant une personnalité "humaine", et même une forme "corporelle" propre.

    C'est une vision qui allait, du temps de Swedenborg, à l'encontre de celle des philosophes de son temps qui pensaient que la vision d'un Dieu personnel, qui plus est "humain", était seulement le fait d'un anthropomorphisme bien naturel mais archaïque. Dieu ne pouvait être qu'informel et impersonnel, et les représentations que s'en font les hommes est nécessairement fonction de la culture et de l'histoire. Plus tard, pour les historiens et les psychologues des religions, c'est "le sentiment ou l'expérience religieuse" qui est le fondement universel, au-delà des représentations et des croyances, de la religion et de son Dieu.

    Pour que le miracle hautement improbable de cet univers soit possible, nous disent aujourd'hui certains astrophysiciens, il faut que l'intention créatrice qui le sous-tend soit empreinte d'une extrême attention et d'une grande "bienveillance" pour tout ce qui est. "Attention bienveillante" que Swedenborg nomme Amour de Dieu. Le Divin a, dans cette perspective, d'emblée une nature et des qualités bien définies, en un mot une "personnalité".  Cela ne peut, de ce fait, être un Dieu cannibale, par exemple. Une telle vision ne serait pas conforme à sa nature véritable et ne pourrait donc pas être un bon vecteur de conjonction avec lui. Encore moins être une bonne pierre de fondement pour aucune religion. Il y a donc une "juste idée du Dieu", juste parce que conforme à sa nature véritable, et c'est par elle qu'il peut y avoir conjonction avec le Divin, ou pas.     
    

 

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